ABeilles. Que souhaitons-nous réellement ?
En modifiant l'ordre naturel des choses, nous nous engageons à assumer pleinement les conséquences de nos actes. Apiculteur depuis une trentaine d'années, j'ai essayé de pratiquer mon métier avec conscience et respect. Je me suis enrichi d'un certain enseignement et m'en suis libéré au fil des ans. Aujourd'hui, mon engagement est toujours le même, tout comme la relation entretenue avec autrui fondée sur la confiance. Maintenant, si cette confiance était remise en question par un consommateur exigeant une certification octroyée par quelques organismes commerciaux qu'adviendrait-il de nos valeurs éducatives ? Si nous ne pouvons plus accorder notre confiance à ce paysan, celui que l'on connaît, est-il possible de l'accorder à un groupe de personnes inconnues dont les intérêts ne sont pas très lisibles ? J'ai refusé des normes qui n'offrent que des points de vue restrictifs — restrictifs aux sens où sous couvert de sécurité sont exclus du circuit ceux ne voulant pas se plier aux exigences de quelques firmes, et ce, même si le travail est pratiqué beaucoup plus sérieusement ; restrictifs car l'objectif premier semble être une standardisation des moyens de productions intensifs, favorisant ainsi les grosses structures au détriment des petites. Ces normes qui n'autorisent aucune place à la différence et dont les enjeux sont véritablement différents des miens.
Mes abeilles ne sont ni nourries, ni traitées, ni poussées à produire. Aucun sucre n'a été donné aux abeilles depuis trente ans. Aucun produit chimique ou organique comme en bio en vue d'un traitement n'a été administré aux abeilles depuis trente ans. Elles évoluent dans un environnement sauvage, loin de toute culture et interventions humaines. La sélection s'accomplit naturellement où les plus résistantes se reproduisent simplement. Elles vivent paisiblement ne connaissant ni les transhumances, ni les dérangements intempestifs des obligations apicoles. Elles sont implantées en petit nombre par ruchers sur la face ouest de la Gironde sous la protection des vents dominants qui éloignent les pesticides et métaux lourds des industries et trafics routiers (nationales et autoroutes) sur le côté est du département. La production volontairement minimaliste ne tolère aucune appellation des miels (comme acacia, châtaignier, bruyère ou autres) pour ne pas affecter les abeilles par de multiples opérations sources de troubles importants notamment au regard des périodes de disettes. Une unique récolte annuelle est pratiquée avec la plus grande attention à l'équinoxe d'automne. Ce miel de fleurs sauvages, d'essences forestières exclusivement est composé de nectars de bourdaine, d'acacia, de châtaignier, de chèvrefeuille, de houx, d'églantier, d'ajonc, d'aubépine, de sureau, de ronce, d'ortie, de camomille, de bruyère, de lierre, de menthe, de rosier sauvage et d'une multitude d'autres touches aromatiques provenant des fleurs de plantes endémiques. Chaque année apporte une signature florale singulière offrant ainsi des notes soutenues d'empreintes gustatives bien distinctes. La production de ce miel est généralement délicate, aléatoire, voire inexistante certaines années.
Afin de ne pas déséquilibrer l'harmonie au sein de l'organisme, aucun prélèvement de gelée royale, de pollen ou d'abeilles n'est effectué durant l'année. Aucun essaimage artificiel n'est pratiqué. Aucun élevage et changement des reines ne sont pratiqués dans les colonies. Les abeilles peuvent ainsi retrouver une juste sérénité, une véritable identité.
Enfin, toutes les substances prélevées miel, propolis et cire sont respectées dans leur nature. Elles ne sont — mise à part la cire — ni chauffées , ni transformées et sont consciencieusement entreposées.
Cet engagement auprès de l'Abeille en premier lieu et des personnes qui consomment ses éléments, n'oublie aucunement l'engagement capital pris envers moi-même, au cœur de mon existence, il y a maintenant une trentaine d'années.
Cet engagement est une des raisons qui me pousse aujourd'hui à rompre l'étroite collaboration entretenue pendant dix-huit ans avec l'enseigne Sobio, fondée par Nathalie et Jean-Marc LACHAT et dont les relations étaient basées sur la confiance et le respect. La nouvelle politique de l'entreprise depuis la vente de l'enseigne à la marque Carrefour il y a cinq ans ne me correspond plus. À partir du 1er janvier 2024, je mets un terme à cette relation. Veuillez par avance m'excuser pour ce choix. C'est aussi cela être engagé.
Vous pourrez cependant continuer à trouver mes produits dans les magasins bio Au jardin d'Alice à Saint Médard en Jalles, chez Sème magasin & restaurant à Arès et chez Pure Planète à Lacanau Océan. Vous pouvez également venir sur place en prenant RV soit par voie électronique, soit en me téléphonant les jours ouvrés du lundi au vendredi de 9h à 12h et de 14h à 18h.
Stéphane Ortega